Laboratoire de Pharmacologie Expérimentale et Clinique
2,
avenue du Pr. Léon Bernard, 35043 Rennes Cedex
(cf. commentaire en bas de page)
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Définitions |
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Pharmacocinétique du placebo 6 Effets indésirables 7 Bibliographie |
Le placebo est une substance inerte délivrée dans un contexte thérapeutique.
Le placebo est une substance généralement commercialisée dont, soit
l'efficacité n'est pas démontrée scientifiquement (homéopathie, certaines
substances phytothérapiques acides aminés, antiasthéniants etc ...), soit
l'indication ne correspond pas à l'indication officielle (vitamine C efficace
dans le scorbut mais probablement pas dans la grippe).
L'effet placebo est
l'écart positif constaté entre le résultat thérapeutique observé et l'effet
thérapeutique prévisible en fonction des données strictes de la pharmacologie.
L'effet nocebo est l'écart négatif constaté entre le résultat thérapeutique
observé et l'effet thérapeutique prévisible en fonction des données strictes de
la pharmacologie.
Le placebo est efficace chez l'animal domestique (conditionnement,
modification de la relation maître-animal), le sujet sain (15 à 25 % des sujets
ressentent "un effet" dont la moitié dans le sens d'une amélioration, l'autre
moitié sans aggravation), l'enfant et même le nourrisson.
La plupart des
maladies ont été étudiées du point de vue du placebo et de ses effets (plus ou
moins marqués selon la nature de la maladie et de la relation médecin-malade).
Les plus fréquemment citées sont : la douleur (fonctionnelle, algie cancéreuse,
post-opératoire, migraine), l'insomnie mais aussi l'anxiété, la dépression, le
trouble panique, le syndrome prémenstruel, le rhume de foins, la toux, la
tuberculose et même la croissance tumorale cancéreuse ...
Le placebo agit,
bien entendu, sur les signes subjectifs, mais est également mesurable sur
certains paramètres objectifs : acidité gastrique, diamètre pupillaire, niveau
de lipoprotéines, de globules blancs (éosinophiles, lymphocytes), électrolytes,
corticoïdes, glucose, cholestérolémie, tension artérielle ... Contrairement à
une idée répandue, ce n'est pas parce qu'un signe est mesurable qu'il est
inaccessible à une action d'ordre psychologique. Ce n'est pas non plus parce
qu'un traitement est d'ordre psychologique qu'il n'est pas relayé par des
mécanismes biologiques.
L'objet placebo : cette notion recouvre les caractéristiques
physico-chimiques de ce qui est prescrit par un médecin en tant que leurre de
médicament. Un grand nombre de paramètres font varier son efficacité dans de
grandes proportions (nom, couleur, taille, forme, goût, prix, nouveauté,
délivrance sur ordonnance ...).
Le médecin : personnalité, charisme,
attention portée, compassion, croyances, présentation du placebo, rituel
médical, notoriété, titres, compétence, durée et prix de la consultation, durée
de la liste d'attente etc ... sont les principaux facteurs de placebo-induction.
Il n'existe pas de profil type de médecin placebo-inducteur.
Le patient :
conformisme, souffrance et attente sont les principaux facteurs de
placebo-sensibilité. Il n'existe pas de profil type de patient
placebo-répondeur. La réponse au placebo n'est pas liée au quotient intellectuel
(QI) ni aux facteurs psychopathologiques (névrose).
La maladie : plus la
charge psychosomatique des symptômes est grande et plus l'attente générée par la
souffrance est forte, plus grandes seront les chances de placebo-réponse.
La
qualité de la relation médecin-malade semble le facteur le plus propre à majorer
(ou minorer) l'effet placebo.
L'efficacité moyenne du placebo est difficile à évaluer globalement, tant
sont nombreuses les variables. Pour la plupart des auteurs, elle se situerait en
moyenne autour de 30 %. Cette donnée statistique n'a en fait guère de
signification puisqu'elle varie en fonction d'énormément de facteurs et
notamment en fonction du symptôme cible. De plus, 35 à 40 % des prescriptions en
médecine concernent en fait des placebos impurs. Pour Beecher qui a regroupé 15
publications, l'effet placebo serait manifeste dans 35 % des cas. C'est dans la
douleur non provoquée expérimentalement que les chiffres sont le mieux établis.
Ces chiffres dépendent de la conception que l'on a de l'effet du placebo :
-
du point de vue du pharmacologue qui tend par vocation à retenir essentiellement
les données issues d'études bien contrôlées et qui, autant que possible, cherche
à isoler un seul paramètre, les chiffres seront sensiblement plus faibles car
obtenus dans des situations artificielles où le sujet de l'expérience qui sait
plus ou moins que c'est l'effet placebo qui est recherché, aura souvent tendance
à le minimiser (pour ne pas perdre la face). Le double-aveugle qui est fait pour
différencier deux traitements administrés dans des conditions identiques, ne
permet pas d'évaluer l'effet placebo lié aux conditions de la recherche. De
plus, un double aveugle ne peut être comparé qu'à un autre double aveugle et les
résultats de la recherche pharmacologique ne peuvent en aucun cas être
extrapolés à une pratique clinique "normale".
- Du point de vue du clinicien
qui prend en compte, de façon pragmatique, tout ce qui peut modifier l'action
"normale" d'un médicament en dehors des situations expérimentales, il est
probable que l'effet placebo atteint aisément, voire dépasse largement ces
chiffres.
Voies d'administration : par ordre décroissant d'efficacité, le placebo peut être utilisé sous forme d'injection intra-veineuse, intramusculaire de comprimés, du suppositoires. Les gouttes seraient particulièrement intéressantes car, en obligeant le malade à les compter minutieusement, elles augmentent sa participation et son attention au traitement.
Latence d'action : le placebo agit en général plus rapidement que le médicament actif. Cette donnée est particulièrement nette dans la douleur ainsi que la dépression où les traitements classiques requièrent en principe deux à trois semaines. Il n'est pas rare de voir certains sujets, et pas forcément des moindrement déprimés, réagir positivement en un ou deux jours.
Pic d'activité : le moment d'activité maximale serait également plus précoce. Dans la douleur, l'effet du placebo d'aspirine serait à son apogée au bout d'une heure, celui de l'aspirine au bout de deux heures.
Durée d'action : le placebo serait actif en moyenne pendant deux
semaines, notamment dans la douleur ; ce chiffre peut toutefois varier
énormément.
La réponse au placebo, à long terme (40 semaines), fut étudiée
au sein d'un groupe de sujets dits "paniqueurs". Au bout de 40 semaines, 42 %
des 60 patients sous placebo n'avaient plus d'attaques de panique et 38 %
étaient nettement améliorés. Parmi les placebo-répondeurs, 27 % présentaient une
réduction de 82 % de leur niveau général d'angoisse. L'auteur a essayé de
différencier cliniquement les sujets bons répondeurs au placebo de ceux qui lui
résistaient et n'a rien trouvé de particulièrement marquant. Les bons répondeurs
s'amélioraient en une semaine, continuaient à aller de mieux en mieux tout au
long des 40 semaines de traitement puis de sevrage progressif. Enfin, un mois
après la cessation des visites, ils continuaient à aller bien.
Relation dose-effet : en cas de résultat insuffisant, il suffit parfois d'augmenter le nombre de comprimés de placebos pour en voir augmenter l'effet. Par exemple, un syndrome anxio-dépressif sera mieux amélioré par 4 comprimés que par 2. Certains exemples sont restés célèbres ; ainsi celui de cet homme traité avec succès par un placebo pour son hypertension artérielle, mais qui s'est vu obligé de supprimer le comprimé du soir qui le rendait trop tendu". Une autre malade, hypertendue soignée de la même façon, voit son poids augmenter. La posologie est réduite de moitié et passe de 4 à 2 comprimés. Son poids se stabilise. L'effet du placebo peut être cumulatif mais tend à s'épuiser au bout d'un certain temps. Son effet peut potentialiser celui des médicaments actifs ou des autres méthodes comme la psychothérapie. Il peut s'avérer parfois utile d'intercaler des placebos dans une séquence thérapeutique, lorsque l'on veut réduire la posologie d'un médicament toxique ou potentiellement addictif.
Dépendance : certains cas de toxicomanie au placebo ont été décrits, comparables à ceux de la morphine, avec des signes de manque, bien que d'intensité nettement plus légère.
Effets indésirables : les placebos amènent des effets latéraux, voire des effets négatifs. Ce phénomène a été regroupé sous le nom d'effet nocebo.
Dans une étude portant sur la claudication intermittente, 37 % des sujets
traités par placebo ont éprouvé des effets indésirables. Dans un grand nombre
d'études concernant les benzodiazépines, effectuées en double aveugle contre
placebo, les effets négatifs sont aussi fréquents dans le groupe placebo que
dans le groupe traitement actif.
A partir du regroupement de différentes
expérimentations (groupes contrôles), les effets nocebo ont pu être énumérés.
Sont retrouvés dans l'ordre de fréquence décroissante : somnolence : 24,7 % ;
fatigue : 17,2 % ; troubles gastriques et intestinaux : 16 % ; difficultés de
concentration : 13,2 % ; céphalées : 11,6 % ; bouffées de chaleur : 11,4 % ;
tremblements : 11 %. Il s'agit ici d'un tableau général et il est bien probable
que les effets dépendent du type de placebo administré, de la personnalité du
patient et des symptômes cibles : s'il s'agit d'un placebo d'antidépresseur, les
effets indésirables seront certainement différents de ceux d'un placebo
d'antalgique ; du fait de l'effet attendu et de la contamination par le
médicament de référence ou déjà reçu. Ainsi, un patient déprimé sous placebo
mais qui s'attend à recevoir un antidépresseur, à partir du moment où il l'a
déjà reçu ou connaît quelqu'un qui a reçu un imipraminique, présentera plus
volontiers, une somnolence, une constipation et une bouche sèche.
Dans une
étude de la néphénisine prescrite contre placebo, chez des anxieux, 10 à 20 %
des sujets ont été aggravés, qu'ils aient reçu la néphénisine ou le placebo. 3
sujets sous placebo subirent un effet indésirable grave : érythème
maculo-papuleux diffus qui disparut à l'arrêt du traitement, intolérance vagale
(nausée, hypotension, sueurs) et un oedème angio-neurotique.
Des cas encore
plus sérieux d'effets indésirables ont été signalés : pertes de connaissance,
nausées, dermatose, urticaire, perte auditive ou visuelle, diarrhée,
vomissements, hallucinations, crampes etc ... Un patient, immédiatement après
avoir pris un placebo, devint aveugle, vertigineux, nauséeux et se sentit
"engourdi autour de la bouche". Il est évidemment difficile, à travers tous ces
exemples, de ne pas évoquer certaines formes de manifestations hystériques...
1) LACHAUX B, LEMOINE P
Placebo, un médicament qui cherche la
vérité
Médsi/Mc Graw Hill édit., Paris, 1988, 148 pages.
2) LEMOINE P
Le mystère du placebo.
Editions Odile Jacob,
Paris, 1996, 238 pages.
3) ROSENZWEIG P, BROHIER S, ZIPFELA
The placebo effect in healthy
volunteers : influence of experimental conditions on physiological parameters
during phase I studies.
Br J Clin Pharmacol 1995 ; 39 :
657-664.
4) ALLAIN H, MARTINET JP, LIEURY A
L'effet placebo : une aide à la
décision thérapeutique
Rev Neuropsychiatr Ouest 1990 ; 103
: 23-33.
Commentaire
: L'auteur, tout au long de son texte raisonne comme si le placebo était une
seule et même préparation (composition fixe) qui serait utilisée dans tous
les essais thérapeutiques auquels il se réfère. Il n'en est rien. Le placebo
a une composition variable, qui est fonction de la préparation pharmacologique
que l'on veut tester (principe actif + excipient). Généralement, il s'agit de
l'excipient seul (mais pas toujours). Or, dans aucun des essais thérapeutiques
contre placebo publiés, cette composition n'est donnée précisément (le terme
"placebo" suffit). La silice colloïdale, le saccharose, le stéarate
de magnésium, l'oxyde de zinc ou de titane, etc. sont des éléments de
composition des excipients que l'on estime généralement neutres. Est-ce le cas
vraiment ? Ont-ils tous été testé individuellement dans la pathologie
considérée ? Non, bien sûr.
Dans le cadre des mes recherches sur la biologie du silicium j'ai été amené a
tester sur moi-même un certain nombre de préparation contenant du silicium.
Une observation en particulier est intéressante et pourrait déboucher sur une
meilleure compréhension de la composante psychique de l'effet placebo. cf. humeur.htm
(pour ceux qui savent lire entre les lignes...).
http://wij.free.fr/pharmaco.htm
Création mai 2001
MàJ le 21 août 2003